Lettre ouverte à tous les membres de la CCI de Maurice (à l’exception de ceux siégeant au Conseil de l’institution et de ses anciens présidents)
Chers membres,
Après une longue absence, je reprends mon clavier pour commenter l’acte proprement scandaleux, honteux et empreint de lâcheté auquel se sont livrés le président en exercice et les membres du Conseil de direction de la Chambre de Commerce la semaine dernière. Comme vous savez, ils ont décidé de maintenir à son poste le triste individu en charge du Secrétariat de la Chambre, après que celui-ci a paru en Cour de Curepipe pour répondre à une accusation de l’ICAC pour s’être livré, dans ses précédentes fonctions à la CWA, à « using office for gratification ».
Durant sa longue histoire, notre institution a su porter correctement la flamme de la défense et de la promotion tant de ses adhérents individuels que des secteurs d’activités qu’elle représente. Par expérience, je sais bien qu’il n’a jamais été facile de le faire, tant les contraintes ont été nombreuses. Moins « chanceuse » que notre institution-sœur, la Chambre d’agriculture (pour qui l’homogénéité des intérêts de ses membres autour du seul secteur agricole aura, semble-t-il, rendu la mission plus linéaire), elle a dû composer au fil de son histoire avec des contraintes majeures : élitisme, conservatisme, orientations étroites, manque de moyens financiers, conflits d’intérêts entre ses membres (parfois même entre ceux d’un même secteur d’activités), contournement des « gros » de l’institution s’étant créé des liens discrets avec de hauts fonctionnaires à travers des loges maçonniques, luttes contre des comportements de politiciens choisissant délibérément leur popularité au détriment de l’intérêt général, etc., etc.
Mais jamais au cours de son histoire, la CCI de Maurice n’a dû subir de la part de son instance directrice – son Conseil – un comportement susceptible de porter atteinte à la protection et la stricte préservation de son image, et jamais ses membres n’ont pris des décisions susceptibles d’affecter sa crédibilité et son intégrité par des manquements au sens de la dignité et du respect de soi au cours de leur mandat. L’absence de dignité, on ne la retrouvait jusqu’ici qu’au niveau des institutions publiques, que des politiciens du calibre du ‘Couard’ Jugnauth ont peuplé de lèche-bottes pour servir leurs propres besoins et intérêts. Mais jamais les grandes institutions multisectorielles du secteur privé n’ont porté volontairement atteinte jusqu’ici au caractère sérieux, décent et respectable de leur mission, malgré d’abord le déclin, puis la décadence, et enfin la déliquescence qui ont prévalu dans le pays depuis le départ des Anglais. Pas jusqu’à la semaine dernière !
La Chambre de Commerce et d’Industrie a été torpillée, de l’intérieur même et sans aucune pression (du moins à première vue) par un travail de sape qui a commencé avec Marday Venkatasamy, qui n’a trouvé aucune bonne raison de s’abstenir de nommer l’individu en question pour remplacer Barlen Pillay. Nous en avons déjà parlé dans une chronique. Ce que ce geste montre, c’est que ce triste être de petite dimension, président de l’institution de nombreuses fois, a fait passer l’année dernière une nomination parfaitement incompatible avant les intérêts fondamentaux de l’institution. Malgré son appartenance probable à une société secrète dont le but essentiel consiste apparemment à se livrer à un travail sur soi-même pour s’améliorer, il a montré que la dignité et le respect de soi sont pour lui de vains mots, sans signification ou importance quelconque. En effet, l’individu nommé par lui qui se trouve (toujours !) à la tête du Secrétariat de la CCI est peut-être bien muni sur le plan des sciences économiques, mais il est nul sur le plan moral et de la décence. Et, de par sa présence continue, il pénalise tout simplement le rôle de l’institution et la confiance des adhérents.
Avec un peu de décence, l’individu en poste au Secrétariat aurait dû comprendre par lui-même, dès le départ, qu’il était inconvenant pour lui de postuler à la CCI, puis d’accepter un poste. Convoqué par l’ICAC la semaine dernière pour répondre à une accusation de non-respect des dispositions d’un contrat portant sur des travaux publics dans lequel des fonds de l’État sont engagés, il aurait dû se rendre compte que le moment de se mettre en retrait (voire de démissionner) était arrivé. Non seulement il est resté en poste, mais il a complaisamment accepté (tacitement ou pas) de conserver ses fonctions, avec la bénédiction du Conseil de la Chambre.
J’accuse ! J’accuse Marday Venkatasamy et Guillaume Hugnin, ainsi que les membres du Conseil en place, d’avoir torpillé l’image, la crédibilité et le respect dus à l’institution, un torpillage effectué de l’intérieur même, pour des raisons uniquement internes, alors que la mise en retrait était la seule voie possible. Par ailleurs, j’accuse le groupe des anciens présidents de l’institution d’avoir laissé approuver cette odieuse opération sans réagir. Que ce triste individu à la tête du Secrétariat de la Chambre doive être considéré, d’un point de vue légal, comme innocent jusqu’au verdict de la Cour, soit ! Mais qu’il ne lui soit pas demandé de se mettre en retrait en attendant le verdict de cette Cour relève soit de l’incompétence, soit d’une grave perte des valeurs essentielles à la base du fonctionnement de notre société, ou soit encore d’un trafic d’influence ou d’une grande inconscience. Ou, allez le savoir, peut-être même de tous ces éléments abjects à la fois. Honte à vous, hommes et femmes indécents et indignes ! Vous serez dorénavant considérés comme les parias de la CCI, les « perdi-banne » du secteur privé, pour le dire en bon créole.
Chers membres de la Chambre,
Cette scandaleuse circonstance ne doit pas rester sans réaction de votre part, car cela signifierait que vous endossez par votre inaction la décision inacceptable prise par le Conseil de la semaine dernière. Et celui-ci pourrait être amené à penser que sa décision n’a rencontré aucun désaveu, alors qu’elle comporte de graves implications pour notre institution, tant pour le présent que pour l’avenir : non seulement notre image est entachée, mais à cause d’elle l’avenir pourrait bien être bien plus disqualifiant.
En effet, figurez-vous un instant une situation à venir où la Cour décide, après délibérations, d’inculper définitivement le triste sire. Malgré la présomption d’innocence qu’il faut lui accorder présentement, cette issue est bien possible. Si jamais cette éventualité se produisait, cela voudra dire, en langage clair, que le Secrétariat de notre CCI aura été géré, pendant xx années et mois, par un potentiel condamnable. Est-ce que notre Conseil, dans son immense sagesse, y a pensé ?
Pire encore : au train où va la dégradation des mentalités à Maurice, est-il impossible de se figurer une situation où ce triste individu resterait en poste après sa condamnation ?
Chers membres, si vous ne réagissez pas, le président et le Conseil de la Chambre pourraient considérer que la décision qu’ils ont prise est acceptable sur le plan de la moralité. Ils pourraient penser ainsi que la présidence et la gestion du Secrétariat, telle qu’elles se présentent dorénavant, n’aura aucune incidence sur sa mission. Or, la confiance des adhérents dans le travail du Secrétariat repose non seulement sur son efficacité, mais aussi et peut-être surtout sur les relations de confiance entre eux et son personnel. La fourniture et les échanges d’information ainsi que la participation à certaines activités dépendent en effet d’une confiance réciproque et du respect de certaines règles du jeu. Il est à craindre que celles-ci ne soient plus comme avant. Merci Marday, merci Guillaume ! Avec votre vision très particulière des choses, la CCI a du souci à se faire. Car conjointement avec Pravind ‘Couard’ Jugnauth, vous partagez quelque chose d’évident : le « paletot » que vous portez est trop grand pour vous. L’étoffe manque cruellement…
Voyez ci-après, membres de la Chambre, ce que je vous propose comme réaction.
Il existe en fait diverses possibilités qui se présentent. L’on pourrait, par exemple, se figurer une situation où un certain nombre d’adhérents approcheraient formellement le président pour demander que soit convoquée une assemblée générale extraordinaire, pour réexaminer tout le dossier. Ce serait la solution la plus percutante, mais elle exposerait au grand jour une attaque contre le Conseil et une division entre les membres, alors que la cohésion, voire l’unité, est fondamentale pour la crédibilité de l’institution. L’on pourrait autrement se figurer une situation où quelques membres prendraient l’initiative de solliciter autant des leurs que possible pour adresser une pétition signée comportant un reproche et une opposition à la décision prise, accompagnée d’une demande formelle de la revoir.
Ou enfin, et à elle va ma préférence, la prise par les membres de la Chambre d’une action passive et calmement menée, presque de manière anodine, qui prendrait les formes suivantes :
- Un arrêt de toute participation aux activités de l’institution (pour le travail des comités, dans la participation à des rencontres avec des visiteurs, dans d’éventuels déplacements à l’étranger, dans la réponse à des propositions du Secrétariat, etc.) ;
- Un refus de payer leur quotité annuelle jusqu’au verdict de la Cour de Curepipe ;
- Et, plus que tout, un refus de participer à la prochaine assemblée générale annuelle, car autrement cela signifierait qu’ils endossent et approuvent, par leur présence, le bilan de l’institution pour l’année précédente, dont sa honteuse décision de la semaine dernière.
Cette dernière solution, si elle se traduisait suffisamment dans les faits, montrera à ce Conseil indigne qu’il reste encore dans la CCI quelques entrepreneurs mauriciens méritant le plein respect et prêts à réagir aux démissions morales inacceptables de ceux à qui ils confient un mandat pour les représenter.
Je vois passer sous mes yeux, en ce moment, certaines réactions et observations sur l’inacceptable décision du président Hugnin et des membres du Conseil. Elles viennent montrer que, fort heureusement, un certain nombre de personnes continuent à chérir la dignité et le respect de soi. Ce comportement est d’autant plus édifiant que la quasi-totalité des valeurs essentielles qui donnent un vrai sens à la vie, si difficile soit-elle, est en voie de disparition rapide chez nous.
La CCI est une institution responsable, affirme son président, dans un communiqué illustrant son irresponsabilité. Mais qu’est-ce qu’avait alors ce sacré dictionnaire Larousse à définir l’adjectif ‘responsable’ comme suit : « Qui est réfléchi, sérieux, qui prend en considération les conséquences de ses actes ». Le Conseil de la Chambre a-t-il pris en considération la conséquence de ses actes en ne mettant pas l’individu du Secrétariat temporairement en retrait ? Guillaume Hugnin tente de défendre l’indéfendable ! Dans cette démarche, il est tout simplement minable. Pour sauver la face de la CCI et sa présidence, il lui reste encore la possibilité de démissionner. Mais, pour cela, il faudrait encore qu’il sache ce qu’est le courage ! Les paris sont ouverts…
A. Jean-Claude Montocchio
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